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Né Sous X
   
 
 
L'Europe, dernier espoir des nés sous X
La Cour européenne juge aujourd'hui la France à travers l'affaire Odièvre.
   

jeudi 13 février 2003

. L'histoire de milliers de Français va se dénouer aujourd'hui. Ou se cristalliser pour de longues années encore. Ce jeudi, la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg rend son arrêt dans l'affaire Odièvre. Pour la première fois, la justice européenne tranchera entre deux droits : celui des enfants à connaître leur origine, et celui des mères de naissance à tenir leur identité secrète. Pascale Odièvre a attaqué la France en 1998 pour atteinte au respect de la vie privée et familiale, et pour discrimination. Cette femme de 37 ans a été abandonnée à sa naissance. Au fil d'une quête douloureuse, elle a appris qu'elle avait trois frères. L'administration a refusé de lui dévoiler leurs identités, comme celle de sa mère, puisque la loi française protège comme un secret d'Etat le droit à accoucher dans l'anonymat.

Avis vital. Si la cour de Strasbourg condamne la France, les 400 000 personnes nées sous X ou privées de leur état civil d'origine lors d'une adoption pourront avoir accès à leur dossier (1). Beaucoup parmi eux ont déjà réussi à retrouver les traces de leur mère par leur propre enquête. Mais pour ceux qui ont été abandonnés avec une demande explicite d'anonymat, ceux qui ont été confiés à des oeuvres privées catholiques ou ceux qui ont vu le jour dans des départements où les services sociaux refusent toute information, l'avis de la cour est aujourd'hui vital. La cour pourrait ébranler un dogme du droit français qui impose le secret et l'effacement des géniteurs : dans les accouchements sous X, dans l'adoption et dans les procréations médicalement assistées.

Mais la Cour européenne peut aussi laisser les choses en l'état. Le gouvernement français met tous ses espoirs dans le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles (Cnaop), innovation principale de la réforme que Ségolène Royal a fait adopter en janvier 2002 pour éviter la condamnation. Une de ses missions est de retrouver les mères recherchées par leur enfant et de leur demander si elles acceptent de lever l'anonymat (lire ci-contre). «La loi a été votée à l'unanimité», insistait le représentant du gouvernement français, François Alabrune, devant la cour. «Le conseil dispose de moyens d'investigation importants pour obtenir la levée du secret.» Pour l'avocat de Pascale Odièvre, maître Didier Mendelsohn, «le législateur n'a ouvert qu'un droit, celui de chercher ses origines, pas de les trouver». Il estime que le gouvernement a de plus «saboté» le Cnaop, en «virant» le président choisi par Ségolène Royal, et en le remplaçant par le professeur Henrion, partisan de l'accouchement sous X, et surtout en nommant comme secrétaire générale Marie-Christine Le Boursicot, conseillère juridique de la plus puissante des fédérations de parents adoptifs et conseillère du gouvernement français à Strasbourg contre... Pascale Odièvre.

L'actuel gouvernement français, fervent partisan de l'accouchement sous X, estime qu'une condamnation par la cour n'entraînerait pas la suppression du Cnaop. L'arrêt du 13 février sera définitif et fera jurisprudence.

1) Entre 500 et 700 enfants naissent sous X actuellement, contre 10 000 par an jusqu'au début des années 80.
 
   
     
   
   

mise à jour le 20 février 03